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chapeau, excitée et heureuse. Elle conversait avec ses frères, ses sœurs, sa maman, oubliant l’heure, et lorsqu’un causeur intéressant racontait un récit, elle l’écoutait en buvant ses paroles.

Et Pierre, irrité, se contenait de moins en moins lorsqu’Annette revenait à lui craintive et contrite. Un autre plus habile l’aurait abandonnée, libre et jeune, aux mouvements de sa pure, loyale et saine jeunesse. Il se serait contenté de la mettre en garde, de la former avec une tendre douceur énergique et de lui faire adopter, peu à peu, le changement d’attitude que nécessitent les fiançailles chez une jeune fille. Et surtout il lui aurait demandé avec instance de réfléchir avant d’agir et de se surveiller sans cesse afin d’éviter les incidents désagréables que sa précipitation entraînait. Mais Pierre était jaloux, et lorsque l’homme est jaloux il devient vite injuste, emporté et brutal.

— Annette, lui disait-il, je ne peux pas vous pardonner plus longtemps. La prochaine fois, ce sera fini entre nous. Vous ne m’aimez pas pour m’oublier ainsi.

— C’est plus fort que moi, je prends feu trop vite. J’essaie de me modérer, mais je ne peux pas toujours réussir encore. Mais