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est un de mes grands amis. J’étais heureuse de le revoir. Et nous étions si bien en montagne, au galop des chevaux. J’étais étourdie, un peu grisée et ivre de vitesse. Le temps a passé et je ne me suis aperçue de rien.

D’ailleurs ses paroles plaidaient moins bien que ses yeux et que l’expression éloquente de ses traits. Il était impossible de s’y tromper tant l’innocence rayonnait d’elle. Elle était partie, sans penser à autre chose, parce que la proposition d’une course à cheval l’avait tout à coup saisie et enthousiasmée de bonheur.

Le sang lui montait maintenant à la figure de ce qu’on pouvait la croire coupable d’une indélicatesse. Elle s’accrochait au bras de Pierre, pleurant presque, demandant l’oubli et le pardon. Cette première brouille la mettait hors d’elle-même. Alors il s’adoucit un peu.

— Je sais bien que vous n’êtes pas coupable. Mais il faut surveiller les apparences, Annette. C’est avec elles qu’on se fait une certitude.

Annette demeura près de lui, plus humble et plus soumise, anxieuse et attentive, redoublant dans ses yeux l’expression affectueuse afin de reconquérir le cœur de Pierre et de consoler la souffrance qu’elle lui avait involon-