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désolation immense de la terre, verser sur eux la pluie des injures brûlantes comme une lave et leur jeter à la face le sang qu’ils ont fait couler dans la boue…

Pierre Langelier se tait. Sa voix ardente, basse et contenue cesse de vibrer. Il s’assied dans un fauteuil, les coudes sur les genoux et la tête dans les mains. Il souffre. Il s’étonne d’avoir manifesté le dégoût et la rancune d’un homme tombé comme si déjà, au-dedans de lui-même, il avait renoncé à la lutte.

— Alors que comptez-vous faire, mon cher Pierre ?

— Je n’ai rien décidé définitivement encore. Je réunirai probablement une assemblée pour poser la candidature de Dorion en face de la mienne.

— Si vous voulez tenir jusqu’au bout vous êtes certain d’une victoire, car Dorion reculera devant une scission du parti.

— Je ne sais trop. Il joue tout son avenir sur une même carte.

— Au Conseil législatif vous pouvez compter sur un appui solide.

***

Il se fait tard. Villebert a quitté la maison, attristé et inquiet, après de vaines paroles