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sursaut de colère le soulève en même temps que se réveille en lui une de ces fortes et terribles jalousies d’homme à homme qui fouettent toutes les énergies de sa nature. Il fait appeler son ministre sans portefeuille afin de précipiter la crise, d’exiger de lui une démission immédiate et de circonscrire et tuer la révolte. Mais Jean Dorion est loin de la capitale et il est impossible de l’atteindre.

Pierre Langelier arpente son bureau d’un pas nerveux. Sa colère sans issue agite d’abord son corps puissant et sain. Puis il se calme peu à peu. Une seule solution, toujours la même, se présente à son esprit : brusquer les choses, réorganiser tout de suite son cabinet, dissoudre les Chambres, faire un appel au peuple. Dans des circonstances semblables, la victoire est toujours au plus décidé, au plus ferme, à celui qui impose à l’autre la conviction qu’il ne cédera pas. Car les révoltes politiques aboutissent rarement et ne sont la plupart du temps que des parades. On recule devant la querelle finale et la scission définitive. C’est pourquoi Pierre Langelier prépare une réunion extraordinaire du cabinet et une assemblée secrète de tous les députés ministériels. Personne ne sait rien encore. Et il est certain d’un succès lorsque