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sont partis pour des camps de repos ou de pêche, au fond des forêts.

En réfléchissant bien, Pierre Langelier est moins inquiet. Même parmi les manufacturiers, il est difficile d’atteindre à l’unanimité sur les questions politiques. Il y a toujours des mécontents, des dissidents et des rivaux qui font bande à part. Puis le premier ministre n’ignore pas son emprise sur cette province sensible plus qu’aucune autre au charme de la parole. Il l’émeut, la soulève, l’agite, il est le dominateur dont le verbe a des échos infinis. Acculé au pied du mur il peut avoir des offensives brutales et passionnées qui rétabliront l’équilibre et vaudront beaucoup d’écus. Dorion par contre est un assez piètre orateur.

Le premier ministre reprend confiance ; déjà il prépare un plan d’action. Une dissolution subite surprendrait l’adversaire désorganisé. Dans deux ou trois jours, après avoir consulté des amis sûrs, il prendra une décision. Il part pour déjeuner, la tête rejetée en arrière, la figure pâle, les yeux brillant d’un feu intense. Son cerveau est en ébullition : les idées agressives et combatives s’y pressent, abondent et se multiplient.

Puis il rentre de nouveau dans l’hôtel