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Le Rêveur



Dès le collège nous l’avions surnommé « le rêveur ». À cette époque je ne comprenais pas son caractère. Bien que nous fussions de grands amis, nous contant des choses intimes et nous révélant les mystères de nos natures, je reconnaissais toujours que des coins et des replis de son âme me restaient obscurs et fermés. Je ne devinais pas la signification entière de ses idées ou l’expression de ses yeux et de sa physionomie. Tel qu’il se présentait au premier abord, calme, absorbé en lui-même, avec de larges yeux contemplatifs et tranquilles, sa personne posait tout de suite une énigme. Il était étrange. Plus tard j’ai su, et ce fut comme un allumage de lumières en un corridor que l’on vient de suivre dans l’obscurité. Mais je n’y parvins qu’après de nombreuses confidences, des observations répétées et continues, après des questions qui restaient souvent sans réponse, car il était craintif, timide à se livrer, à exposer ses particularités qui étaient grandes. Seule une similitude