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LIVRE II.

LES GONCOURT

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I


LES DEUX FRÈRES

« MM. de Goncourt pensent et sentent à l’unisson, remarquait Sainte-Beuve ; non seulement ils écrivent, mais causent comme un seul homme, l’un seulement avec plus de réflexion et de suite, l’autre avec plus de pétillement et de saillies. » Les voilà bien, tels que Gavarni les a représentés dans Masques et Visages ; c’est l’attitude de desillusion, déjetée, alanguie de l’aîné ; c’est le regard étincelant, malicieux, critique, et sur les lèvres closes, la verve ailée, à peine contenue, du plus jeune.

De vieille souche champenoise, Edmond et Jules de Goncourt, sont nés, l’un à Nancy, l’autre à Paris, à huit années d’intervalle, 1822 et 1830. Leur grand-père, Huot de Goncourt, fut député du Barrois à l’assemblée constituante : son portrait, aux solennités poudrées, aux yeux fouilleurs, au nez en bec d’aigle