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tempérament contraire, étaient encore divisés par l’éducation etn’avaientrienqui les rapprochât. Ces déductions conduisent aux origines. Connaître le sol dans lequel naît une créature humaine, sa race, ses premières impressions, le milieu qui ïftflue sur elle à l’âge adulte, c’est avoir la clef de son caractère.

Les éducations mystiques exercent des ravages sur les intelligences féminines. Lisez, si vous voulez être convaincus, les premiers volumes de l’Histoire de ma vie par George Sand. L’encens, les fleurs, l’ombre, les chuchotements de l’église, ce reste de moyen âge dans notre monde moderne, que de détraquements nerveux cela n’a-t-il pas produits ? Madame Bovary n’est que l’étude d’un cas pathologique extrêmement fréquent dans nos sociétés avancées.

Voilà madame Bovary avec sa mauvaise éducation idéaliste ; en pension, déjà nerveuse et détraquée, elle n’aime de l’église que ses parfums et son mysticisme sensuel. Au fond du cloître où aucun bruit du monde ne lui parvient, elle est déjà la névrosée dont parle M. Du Camp. — Pleurant pour un rien, inventant de petits péchés pour rester plus longtemps dans l’ombre du confessionnal, sous le geste bénisseur du prêtre, elle songe à des félicités vagues, elle s’élance dans je ne sais quelles contrés féeriques. Son imagination commence à manger son cœur. Elle aura beau retourner tout à l’heure à la ferme du père Rouault ; elle y marchera toujours dans « son rêve étoile, » elle y verra aussi peu les réalités qui l’entourent. Double question de tempérament et d’éducation.

Voici, au contraire, Charles Bovary. Médiocre, incurablement médiocre, de sang épais et d’intelligence lourde, patient, sans imagination, ne sortant jamais du