Page:Desprez - L’Évolution naturaliste, 1884.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

M. Coppée est dans la force de l’âge et du talent. Cependant on peut craindre qu’il ne se renouvelle pas et vive sur le passé. Il ne faut compter que sur des poètes plus jeunes.

En 1880, un volume crânement intitulé : Des vers, surprit et charma les lettrés. Le livre, lancé à l’impromptu, sans réclames, eut deux ou trois éditions. L’auteur, M. Guy de Maupassant, déjà connu pour une nouvelle, Boule de suif, qui révélait un observateur et un artiste, soucieux décomposition et de style, venait de bonne école. Disciple, et, en quelque sorte, fils adoptif de Gustave Flaubert, c’est de l’auteur de Madame Bovary qu’il avait appris l’harmonie de la période et la justesse de l’expression. Le grand styliste se plaisait à revoir ses essais, lui faisait raturer impitoyablement les phrases peu sonores. Et lorsque, le dimanche, les amis de Flaubert se réunissaient, ils trouvaient M. de Maupassant déjà établi près du maître. Dans cette atmosphère intellectuelle, les rares qualités du jeune homme se développaient. Dès les premiers vers, dédiés au paternel ami que j’aime de toute ma tendresse, à l’irréprochable maître que j’admire avant tous. » M. Guy de Maupassant fut regardé comme un des écrivains de l’avenir, une des espérances de la génération grandissante.

Le poète est un panthéiste, un naturaliste entre les naturalistes. L’homme, souverainement dominé par les choses, reste bien au premier plan, mais l’arbre et la bête s’élèvent presque à son niveau. Il y a là une juvénile exubérance de Normand.

    universitaire, enthousiaste de Severo Torelli, (ô 1830 !) en a fait la plus cruelle critique : c’est presque une tragédie. Entre le lyrisme assagi de M. Coppée et le lyrisme fou de M. Richepin, j’avoue mes préférences : mieux vaut tomber avec les Burgraves qu’aller aux nues avec Lucrèce.