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parce qu’il correspond à un nouvel état de choses que les années accentueront. Après un siècle d’incertitudes et de bouleversements, la littérature qui a suivi en tout les évolutions philosophiques, sociales et politiques de ce temps, prendra une nouvelle forme, moins muable que les précédentes, et qui durera autant que la société aujourd’hui en formation.

Que sera donc cet art populaire que j’oppose à l’art aristocratique du XVIIe siècle ? Un lettré, qui vivait comme un rat dans le monde ancien, et détournait les yeux avec horreur pour ne pas voir venir le monstre, Sylvestre de Sacy, a bien nettement dessiné les grandes lignes de la nouvelle littérature : « expression de la démocratie, mobile comme elle, violente dans ses tableaux, hardie ou négligée dans les mots, plus soucieuse du succès actuel que de la renommée à venir… féconde et inépuisable dans ses œuvres, capable de fournir à la consommation de tout un peuple. »

Mais, quoi qu’il en soit, cette littérature ne fait que poindre. D’abord le public n’est pas formé, puis les romanciers naturalistes n’ont pas encore su se débarrasser de la phraséologie romantique dont les complications pittoresques sont trop savantes pour s’imposer à l’imagination populaire.

Il faut bien le dire, quelque progrès qu’on réalise, l’intelligence des foules n’atteindra jamais qu’à un niveau moyen. Pour un esprit distingué, il y a qua-