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II


LE SENSITIF

M. Alphonse Daudet est de taille moyenne. Sa démarche hésitante trahit son extrême myopie. Sa figure mate aux tons de cire contraste vivement avec une broussaille de cheveux noirs qui retombent de tous côtés en longues boucles ; la barbe soyeuse se partage au menton en deux pointes. Le profil net semble découpé dans de l’ivoire par un ciseau grec ; les pommettes saillent ; l’œil, très noir, est humide et voilé.

De santé frêle, sujet à des chutes terribles, le romancier trouve dans ses nerfs une telle énergie que jamais les caprices du corps n’ont pu entraver le travail de l’esprit. Il y a des maladifs plus solides que des géants. Ce méridional s’enveloppe de laine à la moindre humidité. Il aurait dû vivre sous le soleil de Nîmes, à deux pas des arènes calcinées, et non dans les pluies de Paris.