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  LIVRE I. 21


Poursuivy san8 cesser d'une rage inhumaine,
Qui de la fin d'un mal fait naistre Juille ennuis!
Sa rigueur, toutesrois, me seroit agreable
Si j'avois quelque espoir d'alleger ma douleur;
c Mais c'est un trop grand mal de languir miserable,
Et n'esperer ny paix ny trê\·e à son malheur.•
Si la fleche d'amour dont mOR ame est blessée,

Ne m'eust touché qu'un bras, je l'eusse separé;
J'eusse coupé d'un coup la partie offensée
Pour finir le tounnent trop long-tans enduré.
Mais, la8! cette poison, tout partout espandnfo,
)J'envenime le sang, rame et l'entendement;
)(on coeur en est saisi. C'est donc peine perduë
D'esperer que le tans m'y trouve allegement.

Ce qui plus me tourmente et qui croist mon malnise,
C'est qu'encor en souffrant tant d'ospres passions
(0 cruauté du ciel !), il faut que je me taise,
Et feigne une liesse en mes affiictions.
Car, durant mes tra,·aux, je prendroy patience,
Voire et m'bonorerois de beaucoup endurer,
Si celle que je sers en avoit connoissance, ..
Et si je luy" pouvoy librement declarer.

Ma Diane, mon coeur, ma lumiere et mon ame,
Clef de tous mes pensers, source de mon soucy,
Helas 1 sentez-vous point qne ma cuisante l1ame
S'allume de vos yeux et s'en nourrist aussy?
Ils font que mon ardeur tousjours vil·e demeure;
Ils font que mes desirs ne sont jamais lassez,
Et feront que bien-tost il faudra que je meure,
Bien heureux toutesfois si '"OUS le cognoissez.