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  LIVRE II. 72



STANSES.


Belle et ftere deesse à qui je suis voüé,
Dont le premier regard rendit Amour mon maistrf! i
te ciel durant cet Age ici-bas m'a rait naistre,
ABn qu'à son honneur vostre honneur fust loüé.

Comme dans un miroir on voit toutes les graeel
Au clair de vostre teint, et le vainqueur des dieux
Est aveugle deux fois quand vous fermez les yeux,
Et sans vous ses brandons seroient changez en glarf"s.

Plus j'ay de connoissance et plus je suis ravy
De voir que c'est à vous que Je ciel me destitle :
Car, bien que mon esprit ait celeste origine,
Il se tient bien-heureux d'estre à vous asservy •

Aussi tous les tourmens des coeurs plus Miserables,
Et ce qui plus souvent rait les hommes changer,
Oubly, nOU'Yeau plaisir, course du tans leger.
N'ont pouvoir d'ébranler mes pensers immuables.

Je sçay bien que tout change et qu'il (~st mal-aisé
Que de rien si certain l'homme donne assèurance,
Puisque l'ordre varie et que tant d'inconstance
Se trouve aux elements dont il est composé.

Mesme l'an qui ce jour commence et renouvelle
En diverses saisons departira son cours,
En froid et puis en chaud, en longs et petits jours,
Et la terre, ores laide, en avril sera belle.

Ce grand flambeau du ciel sans fin resplendiisant,
OEil visible de Dieu, fils alné de Nature,
Tousjours dessous un signe immobile ne dure,
Ains change et fait changer l'Age pront et glissant.