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L'Amour n'auroit sans luy ny flamme ny cordage;
Et cornlne cet Amour débroüilla le nuage
De la masse confuse où tout le monde estoit,
Lors que chasque ~lement sans ordre combatoit,
De tant d'esprits confus cet esprit nous dégage,
Et la France luy doit la reigle du langage.
On devient tout sçavant, quand on sçait l'admirer,
Et cet oeuvre si net ne se peut comparer
Qu'à ce chemin de laict que marqua dans la nüe
Ceste bell~ Junon, quand, dormant toute nüe,
\Et sur un Hct d'oeillets ses nymphes attendant,
jllercule à ses tetins elle trouva pendant,
Et veit à son réveil une sente blanchie,
Des perles de son laict à jamais enrichie,
)[t des lys argentez, que la terre conreut
JDe la blanche liqueur, qu'apres elle reçeut.

Esprit, qui des plus grans les loüanges surpasses,
Donnant dedans le sein des Muses et des Graces, \
Tu nous fts un chemin net et delicieux,
Qui peut, en le suivant, nous mettre dans les cÎl~ttr.
\ Ces paroles d'amour qu'Amour t'a revelées,
1Plus pures que les lis- qui croissent ès vallées,
Sont lis pris sur un Inon1 où personne n'atteint,
Qui ne perdront jamais la couleur de leur teint;
Car aux jardins du ciel ils ont eu leur naissance,
Et plantez en la terre, à l'honneur de la France,
D'une immortelle main, la mere des Amours
Les va d'une eau de Jleulihe arrouser tous les jours.

Escrire encore apres ces paroles divines,
C'est bien aupres des lys approcher les espines;