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  DIANE,  


Mariniers, comme amans, ..ivent toujours en craiftte,
Car en mer et en femme il ne faut avoir toy.

Si quelqu'un est pensif, so.dain je croy qu'il pense
En ce bel oeil guerrier, qui commemoy l'oft"ense;
Si je le voy joyeux, je eraina qu'il soit contant,
Et souhaite en 'pleurant que mes Jeux me deooiventi
BreC, tous eeux que je voy, j'estime qu'ils reçoivent
Plus'de faveurs que moy, bien qu'ils n'aiment pas tant.

Suis-je pas malheureux de vivre en telle sorte!
la foreur par le tans se rend toujours plus forte,
Mille loups affamez me tiraillent te coeur;
Or' j'ai la raoe blesme, or' elle est enftamée,
Or' je voudroy donner aD lravers d'ODe ann~,
Or' je n'ose paroistre et meurs presque de pe~.

Vive source d'ennuis, harpye insatiable,
Le tourment de toy·mesme, eDJ'agée, incurable,
Portant au chef cent yeux iJleessammeot ouverts,
Ouverts pour nostre mal, clos pour noslre liesse,
Las! plus je parle à toy, plus tu crois ma tristesse
Et remplis mon esprit de serpens et de vers.

Tu rens mes yeux si clairs, qu'une longue distance
Re les peut empescher de voir en leur presance
La beauté flUe j'adore entre dix mille amans;
Je voy sa blanche main qui de l'un est touchée,
A l'autre elle sourit, sur l'autre elle est couchée,
Et voy qu'elle se plaist en ces contantemens.

Tu fais que mon esprit en cent lieux se transporle, Mon
penser ennemy sur tes ailes se porte,
Pressé d'un aiguillon qui vivement le poind :
Tu fais trouver mon corps où il ne sçauroit estre,