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Observation sur une dénudation considérable du crâne sans solution de continuité aux os, guérie en fort peu de temps sans suppuration


Un homme de soixante et quelques années, d’une taille et d’un embonpoint plus que moyens, meunier de profession tomba le 10 avril 1784, depuis l’arbre-tournant d’un moulin à vent jusqu’à terre où sa tête porta la première et où elle laissa l’impression de sa forme. Dans cette chute, qui étoit d’environ trente pieds de haut, cet homme donna du front avant d’arriver à terre contre un des échelons du volant ; ce qui lui coupa transversalement d’un seul trait, depuis une tempe jusqu’à l’autre, la plus grande partie des sourcils et la racine du nez jusqu’à l’os. Dans le cours de cette chute singulière, la tête ayant roulé d’avant en arrière, il en résulta que toutes les parties molles du front, ainsi que les sourcils, se trouvèrent entraînées avec le périoste jusqu’au haut du coronal, où elles avoient été poussées par la force dirigente que le poids du corps sur la tête avoit déterminée. Cela ne pouvoit être ainsi, que les tégumens depuis l’extrémité externe de chaque sourcil ne fussent déchirés jusqu’à l’oreille de chaque côté, et c’est ce qui étoit arrivé. En conséquence, le front et les tempes se trouvèrent dépouillés, le péricrâne ayant suivi les autres envelopes frontales, ainsi que je l’ai observé. Il a donc fallu que la tête fit dans la chute, dont il s’agit, un roulement très étendu d’avant en arrière, puisque la dénudation se continua dans le même sens jusqu’au dessous de la protubérance occipitale externe ; de sorte que pendant que les sourcils restoient bandés et fortement tendus au haut du front, il se feroit un épanchement sanguin sur le derrière de la tête entre le crâne et les parties molles qui le recouvrent en cet endroit.

Arrivé auprès du blessé trois quarts d’heure avant la chute, je le trouvai dans l’état décrit et pour ainsi dire, sans pouls, ayant presque la pâleur de la mort. La connoissance qu’il avoit perdue commençoit à revenir, l’ayant fait transporter chez le fermier de Cressonsacq, mon premier soin fut d’examiner toute l’étendue du coronal, que je trouvai dépouillé de son périoste, mais dans son intégrité. L’avantage de cette dernière circonstance me détermina à faire descendre les enveloppes frontales, aussitôt que