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V

LA VOLTAIROMANIE. — LA DÉIFICATION DU DOCTEUR ARISTARCHUS. — DÉSAVEU DE DESFONTAINES.

Ce fut le 12 décembre que parut chez Chaubert, « en réponse au libelle du sieur de Voltaire » la Voltairomanie ou Lettre d’un jeune avocat. Il va sans dire que le jeune avocat était l’auteur de cette œuvre enragée comme le chevalier de Mouhy l’était du Préservatif. La supercherie eût été grossière, si Desfontaines eût tenu sérieusement à donner le change. Mais ce qu’il voulait, tout au contraire, c’est qu’on ne doutât pas qu’il en fût le vrai père. Et partout où il allait, il avait le pamphlet dans sa poche, tout disposé à en donner lecture, pour peu qu’on semblât l’y autoriser.

Je me souviens que cet écrit n’étoit pas encore public, lorsque le marquis de Loc-Maria se proposa de donner un grand dîner à divers gens de lettres qui ne s’aimoient pas : il y avoit entre autres l’abbé Desfontaines, l’abbé Prévost, Marivaux, M. de Mairan. Il m’invita à ce repas, en me disant : Je suis curieux de voir comment mon dîner finira.

Je me rendis chez le marquis, où je trouvai une grande assemblée ; l’abbé Desfontaines nous proposa, avant le dîner, d’entendre une lecture qui, disoit-il, nous feroit grand plaisir. On agréa sa demande ; il nous lut la Voltairomanie, qui, loin de nous faire plaisir, fut regardée comme un libelle très-grossier ; lui