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sais si la nature humaine comporte cette perfection que supposeroit la liberté indéfinie de parler et d’écrire. Je doute qu’en aucun pays, dans les républiques, aussi bien que dans les monarchies, ceux qui gouvernent aient jamais pu supporter cette liberté indéfinie. Aristophane a mis sur la scène Cléon et Alcibiade, mais je soupçonne que c’est dans le temps qu’Alcibiade étoit dépopularisé, et qu’il y avoit mis un 31 mai contre Cléon, et cela ne prouve pas plus la supériorité de la démocratie grecque, et la liberté indéfinie du théâtre d’Athènes, que celle de notre théâtre seroit prouvée aujourd’hui, par une comédie entre les constituans ou contre la municipalité de Bailly. Les archontes d’Athènes étoient pétris de la même pâte que nos magistrats et nos administrateurs de police, et n’étoient pas plus d’humeur à souffrir la comédie d’Aristophane, qu’aujourd’hui celle de Fabre d’Églantines. La loi d’Antimachus à Athènes, contre les personnalités, de même que la loi des décemvirs contre les écrits, prouve que ceux qui ont eu l’autorité à Rome ou à Athènes, n’étoient pas plus endurans que le Père Duchesne et Ronsin, et qu’on n’entend pas plus raillerie dans les monarchies que dans la république. Je sais que les commentateurs ont dit qu’Aristophane, dans la guerre du Pélo-