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démocratie, le pessimisme de ces détracteurs éternels du présent, dont la bile s’épanche sur tout ce qui les environne, que ce froid poison de la crainte, qui fige la pensée jusqu’au fond de l’ame, et l’empêche de jaillir à la tribune, ou dans des écrits ! Mieux vaudroit la misantropie de Timon, qui ne trouve rien de beau à Athènes, que cette terreur générale, et comme des montagnes de glace, qui, d’un bout de la France à l’autre, couvrent la mer de l’opinion, et en obstaclent le flux et reflux ! La devise des républiques, ce sont les vents qui soufflent sur les flots de la mer, avec cette légende : Tollant sed attollunt. Ils les agitent, mais ils les élèvent. Autrement, je ne vois plus dans la République que le calme plat du despotisme, et la surface unie des eaux croupissantes d’un marais ; je n’y vois qu’une égalité de peur, le nivellement des courages, et les ames les plus généreuses aussi basses que les plus vulgaires. Toi-même, par exemple, je dirai seulement, pour ne pas te flatter, toi qui as eu, en ne te donnant qu’un mérite de calcul, toi qui as eu le tact et le bon esprit d’être aussi incorruptible, de ne pas plus varier, pas plus déménager que Robespierre ; toi qui, dans la révolution, as eu le bonheur que toutes ses phases n’en ont amené aucune dans ta condition et ta fortune ; le bonheur