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Avant Bailly, Montesquieu, un président à mortier avoit professé le même principe, qu’il ne peut y avoir de république, sans la liberté de parler et d’écrire ». Dès que les décemvirs, dit-il, dans les lois qu’ils avoient apportées de la Grèce, en eurent glissé une contre la calomnie et les auteurs, leur projet d’anéantir la liberté et de se perpétuer dans le décemvirat, fut à découvert. » De même le jour qu’Octave, quatre cents ans après, fit revivre cette loi des décemvirs contre les écrits et les paroles, et en fit un article additionnel à la loi Julia sur les crimes de lèze-majesté, qu’on peut dire que la liberté romaine rendit le dernier soupir. En un mot, l’ame des républiques, leur pouls, leur respiration, si l’on peut parler ainsi, le souffle auquel on reconnoît que la liberté vit encore, c’est la franchise du discours. Vois, à Rome, quelle écluse d’invectives Ciceron lâche pour noyer dans leur infamie Verrès, Catilina, Clodius, Pison et Antoine ! Quelle cataracte d’injures tombe sur ces scélérats du haut de la tribune !

Aujourd’hui, en Angleterre même, où la liberté est décrépite, et gissante in extremis, son agonie, et lorsqu’il ne lui reste plus qu’un la souffle, vois comme elle s’exprime sur guerre, et sur les ministres et sur la nation française.