Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La tempeste redouble, & la pluye, & la gresle.
De la Terre et du Ciel les sources pesle-mesle,
Font une large mer, dont la prompte fureur
Renverse en un moment l’espoir du laboureur.
Ainsi quand des humains l’outrageuse insolence
Eût irrité de Dieu la longue patience,
Et les Cieux & les mers firent un juste accord,
Pour punir tant d’horreurs par une égale mort.
Les humides amas des airs et des abysmes,
De la race mortelle esteignirent les crimes ;
Les villes & les monts de flots furent couverts ;
Et l’element liquide engloutit l’Univers.
Clovis qui de torrens void la terre couverte,
Croit que le Ciel de mesme a conspiré leur perte.
Il gagne un lieu plus haut. Le fleuve qui le suit,
S’enfle, & semble orgueilleux de ce qu’un Roy le fuit.
Enfin il cede aux eaux ; et va sur la montagne,
Découvrir le deluge épars dans la campagne.
Il arrive au sommet ; et ses yeux sont surpris
De voir d’un grand Palais le superbe pourpris.
Aurele s’en approche, & curieux regarde
Que la pompeuse porte est ouverte & sans garde.
Ils admirent ce lieu, de forests enfermé,
Et de telle structure, & si peu renommé.
Ils entrent dans la court, où cent torses colonnes,
Dont les chapiteaux d’or sont les riches couronnes :
Separoient cent Heros, que le ciseau sçavant
Sembloit avoir changez en un marbre vivant.