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Le ciel estoit serain ; & la voûte azurée
Blanchissant de l’ardeur d’une flame épurée,
N’avoit un seul nuage, en sa vaste grandeur,
Qui cachast du Soleil la brillante splendeur ;
Quand un grand voile obscur s’épandit sur leurs testes ;
Sans entendre les vents, presages des tempestes ;
Et sans voir dans les airs de ces vistes oyseaux
Qui rasent de leur aile et les champs et les eaux.
La Terre s’embrunit d’une horreur impreveuë ;
Et le Ciel à regret se dérobe à la veuë.
Clotilde s’estonnant de ce calme trompeur,
Sent à sa peur se joindre une plus grande peur.
Un vent impetueux tout à coup se réveille.
Les éclairs frapent l’œil, & les foudres l’oreille.
Le nuage se creve ; et l’onde à gros boüillons
Dé-ja couvre la terre, et court par les sillons.
Alors sur les amans semblent estre versées
Les humides vapeurs dés long-temps amassées.
Sur leurs riches habits coulent de longs ruisseaux.
Clotilde enfin cedant aux importunes eaux,
Sous le manteau du roy s’en deffend, & se cache ;
Et d’un pudique bras à son Prince s’attache.
Cependant des costaux tombent de gros torrens,
Qui roulent aux vallons par des chemins errans.
De là commence à naistre un danger qui les presse.
Sous le pied des chevaux l’onde s’enfle sans cesse.
Le fleuve rompt ses bords ; l’eau s’espand des estangs ;
Et dé-ja les assiege, & leur gagne les flancs.