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Ses tresors enlevez, des gardes le carnage,
Et son isle forcée, et le sanglant passage.
Il veut que sans delay, sur un pont de bateaux,
Son camp de la Vienne aille passer les eaux.
Les goths, encore vains de leur antique gloire,
Des françois rallentis esperent la victoire :
Disent qu’avec le temps ils sçauront les dompter,
Fuyant leur premier feu, que l’on doit éviter.
Cette nombreuse armée, et fugitive et fiere,
Attaint prés de Lussac la paisible riviere.
Ils passent file à file ; et sans estre troublez,
Le mobile plancher de bateaux assemblez.
Le françois qui les suit, ne paroist pas encore :
Mais le verbe divin, qu’il vange et qu’il adore,
Commence à les combattre, et sur leurs bataillons
Fait fondre un rude orage, et de forts tourbillons.
Toute l’armée à peine a franchy le passage,
Qu’Alaric fait du pont destruire l’assemblage :
Et malgré l’eau qui tombe, et qui trempe le bois,
Fait bruler les bateaux, enduits de noire poix.
Voyant grossir le fleuve, à ses vœux favorable,
Il aime la tempeste, et la croit secourable.
Il dédaigne les francs ; et ne redoute pas
Que de long-temps encore ils attaignent ses pas.
Clovis et jour et nuit fait marcher son armée,
Par la fuite des goths encor plus animée.