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Il void l’heureux estat, & l’aimable sejour,
D’un prince qui le sert, & qu’il sert à son tour ;
D’Auberon l’Enchanteur, dont les habiles charmes
Estoient des noirs Enfers les plus fideles armes ;
Qui pouvoit de sa voix transporter les Citez ;
Calmer les flots marins, ou les rendre agitez ;
Forcer les Elemens, le Soleil & la Lune ;
Et courir sans vaisseau sur le dos de Neptune.
L’Ange orgueilleux le trouve en son riche Palais,
Plein d’un essain volant d’invisibles follets,
Qui par leurs siflemens, au Prince font parestre
Qu’ils courent à l’envy, pour recevoir leur Maistre.
De Mercure il emprunte & le visage accort,
Et la taille legere, & l’habit, & le port.
Sa teste & ses talons ont l’aile colorée :
Et sa dextre soustient une verge dorée.
Auberon se prosterne ; & sent à son aspect,
Une secrete horreur meslée à son respect.
Il redoute ses yeux, en qui la flame éclate.
Le faux Dieu le releve, & de ces mots le flate.
Tu Sçays que ton bon-heur a surpassé tes vœux,
Pour m’avoir honoré d’un temple si pompeux ;
Et quels biens t’a produit ma grace liberale,
Puis que nul Prince au Monde en pouvoir ne t’égale.
Sois fidele à tes Dieux. Voicy le temps fatal
D’où naistra pour jamais ou leur bien ou leur mal.