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Sçache donc, ô ! Grand roy, que je ne mourus pas :
Et que jamais mon mal n’alla jusqu’au trépas.
Mais le sage stilite, émeû d’un puissant zele,
Sçachant à quoy le ciel destinoit mon Aurele,
Pour te donner Clotilde, et la chrestienne loy,
Le trompa saintement, pour l’arracher de moy.
Connoissant que mon mal devoit durer encore,
Il voulut que dés l’heure il quittast le Bosphore :
Et me voyant plongée en l’assoupissement,
A peine luy permit de tarder un moment.
Va, la France t’attend : cours, dit-il, sage Aurele.
J’auray soin de ce corps ; vole où le ciel t’appelle.
Il ne pût resister à cet ordre pressant.
Je sçay ce que son cœur souffrit en me laissant :
Et quand j’eûs de mes sens la libre joüissance,
Je sçay ce que le mien souffrit de son absence.
Genereux Arismond, ainsi console toy,
Si je prens pour époux, qui possede ma foy.
Apres cette sentence obligeante et cruelle,
Elle va se ranger pres de son cher Aurele.
Chacun se réjoüit de l’heur de ces epoux.
Arismond seul rougit, et monstre un œil jaloux.
Le roy va l’embrasser ; et dit qu’à sa vaillance
Il prepare en son cœur une autre recompense.