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Escoutez à ma mort ce que dicte ma bouche.
Si Clotilde jamais parvient à cette couche,
Dont par vostre conseil j’ay gousté le bonheur,
Trop peu pour mon desir, et trop pour mon honneur ;
Que ses fils à ses yeux, par de cruelles guerres,
Comme loups acharnez, se ravissent leurs terres.
Que malgré ses soupirs, ses larmes, et ses vœux,
Ils rougissent leurs mains du sang de ses neveux :
Et que toute sa race en marastres feconde,
De tragiques horreurs épouvante le monde.
Puis sortez de mon sang, normans, et me vangez.
Que tous les champs françois par vous soient ravagez :
Et qu’apres vos fureurs, dans une longue guerre,
La France éprouve encor les fureurs d’Angleterre.
Ah ! Que je dois gouster de delices là bas,
Lors que mes descendans, par de sanglans combas,
Feront, d’un fer vangeur, dans les demeures sombres,
Tomber de tant de francs les odieuses ombres !
Doux, mais tardif espoir ! Hé bien, pour me guerir,
Mourons, si je ne puis me vanger sans mourir.
Lors se voyant sans fer à son dessein propice,
Elle court furieuse, et cherche un precipice.
Mais Yoland l’arreste ; et veut pour un moment
Qu’elle preste l’oreille à ces mots seulement.
Ma sœur, s’il faut mourir, je sçay perdre la vie.
Que ta fureur est belle ! Et que je te l’envie !