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Le ciel, dit-elle, est juste, et par ma main t’assiste.
C’est luy qui te nourrit en ta demeure triste.
Alors ce doux objet se dérobe à ses yeux.
Chere espouse, dit-il, qui revoles aux cieux,
Fay moy revoir encor ton celeste visage.
Mais elle fuit, pareille à quelque vaine image
Qu’un agreable songe a fait voir au penser,
Et qu’un fascheux réveil vient soudain effacer.
O ! Seigneur, reprit-il, ô ! Seul en qui j’espere,
Pouvois-tu m’assister par une main plus chere ?
De combien les plaisirs dont tu remplis mon cœur,
De mes plus grands ennuis passent-ils la rigueur ?
Quoy ? Seigneur, me donner des graces singulieres ?
Dans de si noirs cachots, de si douces lumieres ?
Me nourrir, me combler de ces rares bien-faits,
Ou ne pouvoient encore attaindre mes souhaits ?
Il gouste avec respect cette manne celeste :
Mais il savoure mieux l’image qui luy reste
Des transports ravissans que son ame a goutez ;
Et les charmans rayons des divines clartez :
Et dans l’affreuse horreur d’une prison profonde,
Il se croit dans le rang des plus heureux du monde.
Arderic et Lisois, dans ce traistre sejour,
Ne se sentoient liez que des nœuds de l’amour.
Lisois sert Yoland : Arderic s’abandonne
A bruler dans le feu des beaux yeux d’Albione.