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Le char à ses desirs donne une douce amorce :
Et de son premier cours semble allentir la force.
Il l’approche, il le joint, trompé des doux appas ;
Puis le void tout à coup éloigné de cent pas.
Comme un lievre leger, dans une vaste plaine,
Asseuré de sa force, et de sa longue haleine,
Souvent devant les chiens fait voir ses pas plus lents :
Puis tout prest d’estre pris, redouble ses élans ;
Et se perdant aux yeux, d’une plus prompte fuite,
Trompe le doux espoir de l’abboyante suite.
Le prince de sa course animant la roideur,
En pressant du cheval la genereuse ardeur,
De son bonheur souvent gouste ainsi l’esperance :
Et du fier ravisseur medite la vangeance,
Quand il sent d’Aquilon les membres se lassans,
S’estonnant des efforts de ces vistes persans.
Les chevaux de ses chefs le suivent avec peine :
Puis perdent tout à coup et la force et l’haleine.
Aurele restoit seul : mais son barbe lassé,
Fond encore, et sous luy le tient embarrassé.
Enfin le char trompeur entre dans un bocage.
Clovis abandonné, seul dans le fort s’engage.
Le soir, et l’ombre noire en ce bois écarté,
Ne luy fournissent plus qu’une foible clarté.
Lors Aquilon succombe ; et sa vigueur derniere
S’abbat en mesme temps que s’esteint la lumiere.