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De tendresse et d’amour rendent mon cœur percé.
De mouvemens divers le sien est balancé.
Elle me doit l’honneur, elle me doit la vie.
Mais mon fer malheureux à son sang l’a ravie.
Dans ces pensers divers, la haine et l’amitié,
De son sensible cœur partagent la moitié.
Je demeure muet de respect et de crainte :
Mais enfin de sa langue elle rompt la contrainte.
Que mon frere à tous deux nous causa de malheur,
Par les cruels transports de sa vive douleur !
A toy, d’avoir meurtry cet enfant admirable :
A moy, pour le regret de sa fin deplorable.
Mais pour sçavoir mes maux, aussi dois tu sçavoir
La cause de sa perte, et de son desespoir.
Tous deux nous estions nez d’une couche royale,
Enfans de Trasimond, regnant sur le vandale,
Dont l’Espagne long-temps avoit suby les loix.
Mais les sueves guerriers, hardis, depuis vingt mois
Par de frequens combas nous disputoient ces terres.
Les deux peuples enfin, lassez des longues guerres,
Dresserent un accord, que par un seul duël,
Deux princes finiroient le mal continuel ;
Et qu’en cedant au droit qui le sort accompagne,
Le peuple du vaincu sortiroit de l’Espagne,
Pour chercher sa demeure en de nouveaux climas.
Mon pere estoit au lit, inhabile aux combas.