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Soudain au vaillant roy la parole est portée :
Et soudain d’un œil doux la jouste est acceptée.
Il s’arme ; et la princesse errante en son souhait,
Par un mesme regard et l’admire et le hait.
Tantost rouge d’amour, puis de rage blesmie,
Elle se sent amante, et veut estre ennemie.
Et l’ardente fureur soudain la vient saisir,
Quand en elle l’orgueil sent renaistre un desir.
Hé quoy ? Je doute encor, dit-elle en ses pensées,
Apres cent maux soufferts, cent terres traversées,
Incertaine en mes vœux honteux et languissans,
Si je dois le punir du trouble de mes sens ?
Que sa vie, ou mon feu, s’esteigne à la mesme heure.
Pour guerir mon tourment, qu’il meure, ou que je meure.
Il vient : quoy, je fremis ? Est-ce crainte ? Est-ce horreur ?
Mon cœur, tu ne dois plus fremir que de fureur.
Elle envoye à son choix les deux lances meurtrieres :
Et luy fait annoncer ces menaces altieres,
Qu’elle vient pour la guerre, et non pas pour l’ésbat :
Et que la seule mort doit finir le combat.
Lors du casque elle couvre et sa honte et sa rage.
Le monarque estonné du surprenant message,
Courtois demande au moins d’où naist ce grand courroux.
Il en pourra juger la grandeur par mes coups,
Dit-elle ; et l’un et l’autre obstiné se resserre,
L’un à vouloir la paix, l’autre à vouloir la guerre.