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Nous avons comme luy des forces et du cœur :
Un soldat aguerry de cent peuples vainqueur.
Nous avons comme luy des voisins secourables.
Mais à nous, plus qu’à luy, les cieux sont favorables.
Et pour pousser l’effort d’un amoureux dessein,
Nous avons plus que luy de brasiers dans le sein.
Mais toy dont je ne puis me loüer ny me plaindre,
Qui mesprises ma flame, ou qui la veux esteindre,
Voy qu’en me dédaignant, simple, tu te soûmets
A qui dit qu’il t’adore, et ne te vid jamais ;
Dont l’ardeur par le temps ne fut point éprouvée ;
Qui n’eut jamais au cœur ton image gravée :
Tout prest à recevoir, d’un aveugle desir,
La premiere beauté qu’on voudroit luy choisir ;
Quelque fade blancheur, quelque esclave effrontée,
Qui sous ton nom fameux luy seroit presentée.
Pour la sauver des bras de cet indigne amant,
Deffens la Sigismond, contre son sentiment ;
Et puis qu’à son bon-heur son desir est rebelle,
Il faut, il faut combattre et contr’elle, et pour elle.
Oüy, cruelle à toy mesme, encore plus qu’à moy,
Plustost qu’un fier payen triomphe de ta foy,
Qu’un traistre sans amour te ravisse à ma flame,
Au prix de mille morts je luy raviray l’ame.
Apres mon sang versé dans ma juste fureur,
Rien ne me restera qui te soit en horreur.