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L’arc et la trousse au dos, le javelot en main ;
Dompte le fier coursier, le fait partir soudain ;
Telle que Marthesie à la volante tresse,
Qui des vents à la course égaloit la vistesse.
L’amoureux Childeric la suit en l’admirant.
Il vole apres son cœur, qu’elle emporte en courant.
Il resiste à l’amour, et ne peut s’en deffendre.
Il brule de parler, et n’ose l’entreprendre.
Par tout Bisin le suit, amy plein de candeur.
Le prince veut couvrir sa criminelle ardeur.
Il n’aime ny les champs, ny les bois, ny la chasse.
Tout luy déplaist, luy nuit, le trouble, et l’embarrasse.
Il n’ose à son retour la voir pour l’admirer.
Il prend dans la nuit seule un temps pour soupirer.
Est-ce ainsi, Childeric, que l’exil te rend sage,
Dit-il ? à ton amy veux-tu faire un outrage ?
Et pour tes voluptez chassé de ton estat,
Veux-tu te perdre encor, par un mesme attentat ?
D’un roy qui t’a receu veux-tu ravir l’espouse,
Et luy ravir l’honneur dont son ame est jalouse ?
Esteins ta flame impure : ou si tu ne le peux,
Esteins tes tristes jours, pour esteindre tes feux.
Mais l’amour violent, tout infame, tout traistre,
Tout detesté qu’il est, tousjours se rend le maistre.
En vain de l’amitié le juste souvenir
Contre sa folle ardeur s’efforce à le munir.