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gens tout-à-fait pauvres qui n’en ont pas du tout. Ces sauvages sont des hommes qu’on trouve dans les montagnes et dans les lieux déserts : il y en a une tribu qu’on a coutume d’appeler Thoung ou chiens. Quand on en amène dans une ville, ils n’osent ni entrer dans les maisons ni en sortir. Dans une dispute, c’est une grave injure que d’appeler son adversaire chien : celui qu’on nomme ainsi en conçoit le plus vif ressentiment. Cette espèce d’hommes est méprisée par les autres, au point qu’un esclave jeune et robuste n’est évalué qu’à cent morceaux de toile ; ceux qui sont vieux ou foibles n’en valent que trente ou quarante. On ne leur permet de se reposer et de s’asseoir qu’au bas de la maison ; ou si, pour leur service, on leur permet de monter, il faut, avant d’entrer, qu’ils se mettent à genoux en joignant les mains sur le front. Ils appellent leur maître pa-to, et la maîtresse de la maison mi. Pa-to signifie père, et mi mère. Si on les frappe pour quelque faute, ils se prosternent la tête contre terre, et reçoivent les coups sans oser faire le moindre mouvement. Ces hommes[1] se marient entre eux, et jamais leurs maîtres ne voudroient s’allier avec eux. Il y eut un Chinois établi dans ce

  1. L’auteur chinois se sert ici lui-même des expressions de phin et de meou, qui désignent les mâles et les femelles des quadrupèdes.