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CH. II, DESCRIPTION DE SYÈNE

retrouver dans le passage un sens admissible. En effet, aux temps de Strabon et d’Aristide, le nom d’Éléphantine appartenait exclusivement à l’île qui est en face de Syène ; mais je pense qu’il n’en était pas de même au temps d’Hérodote, et il me paraît que c’était un nom générique et commun à plusieurs îles, notamment à l’île de Philæ[1]. Que, dans le récit du prêtre de Saïs, on substitue le nom de Philæ à celui d’Éléphantine, on retrouvera les deux montagnes libyque et arabique, qui, entre Philæ et Syène, se rapprochent en effet l’une de l’autre ; un lieu plein d’abîmes ; des courans qui se portent les uns vers le nord, les autres vers le sud ; des eaux d’une très-grande profondeur ; en un mot, tout ce qui caractérise la chute du Nil à Chellâl, aujourd’hui même que ces effets sont beaucoup diminués[2]. Au reste, l’explication que je hasarde ici d’un des passages les plus difficiles d’Hérodote, est singulièrement appuyée par le raisonnement que fait l’historien lui-même. « Si le récit de ce prêtre est vrai, dit-il, je pense qu’à cet endroit les eaux venant à se porter et à se briser avec violence contre les montagnes, refluent avec rapidité et excitent des tournans qui empêchent la sonde d’aller jusqu’au fond. »

J’ai dit qu’il pouvait y avoir eu de l’équivoque dans le mot de sources dont Hérodote a fait usage ; voici un

  1. Voyez la Description d’Éléphantine, chap. III, §. VI, On appliquait aussi le nom de Philæ à l’île d’Eléphantine, témoin ce passage de Pline, qui est positif : après avoir nommé Syène, il dit, et ex adverso insula IV Philæ ; c’est-à-dire, « en face de Syène est une île de quatre milles de circuit, et que l’on nomme Philæ ; » ce qui est vrai d’Éléphantine (voyez Pline, Hist. nat., l. V, c.9).
  2. Voyez ci-dessus, p.151 et suiv.