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ET DES CATARACTES.

Syène et Éléphantine il y avait deux montagnes dont les sommets se terminaient en pointe ; que l’une de ces montagnes s’appelait Crophi, et l’autre Mophi les sources du Nil, qui sont de profonds abîmes, sortaient, disait-il, du milieu de ces montagnes ; la moitié de leurs eaux coulait en Égypte vers le nord, et l’autre moitié en Éthiopie vers le sud. » Hérodote ajoute que Psammitichus ayant fait jeter dans ces abîmes un câble d’une très-grande longueur, la sonde n’avait pu aller jusqu’au fond.

Hérodote avait raison de douter qu’on lui parlât sérieusement de deux montagnes situées entre Syène et Éléphantine, puisque tout l’intervalle qui sépare ces deux villes est occupé par les eaux du fleuve, et surtout qu’on lui citât ces deux montagnes comme les sources du Nil. Strabon et Aristide, qui, à ce propos, censurent vivement Hérodote[1], n’ont pas considéré qu’il qualifiait lui-même ce récit de badinage ; et, d’un autre côté, ils n’ont pas réfléchi sur la cause probable d’une erreur aussi grossière. Quand on sait que les prêtres égyptiens étaient particulièrement versés dans la chorographie du Nil[2], est-il croyable qu’un d’entre eux pût se persuader que ce fleuve prend naissance auprès de Syène ? Il doit y avoir eu quelque méprise dans l’emploi qu’on aura fait du mot πηγάς qui veut dire sources, pour traduire l’expression dont ce prêtre aura fait usage : or, il suffit que l’on conçoive la possibilité de cette équivoque, pour

  1. Strabon. lib. XVII, pag. 819 ; Aristid. in Ægyptio, t. II, p. 343 et suiv.
  2. Voyez la Description d’Ombos, chap. IV, §. III.