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ET DES CATARACTES.

vallées du monde. La navigation trouve ici une barrière presque insurmontable, la culture cesse, la végétation est morte. Aux campagnes et aux jardins d’Éléphantine succèdent un amas de collines groupées en désordre ou de blocs à pic d’une nudité absolue, et des montagnes à perte de vue, dont la teinte rembrunie se détache sur un ciel éclatant ; le Nil ne réfléchit rien que l’azur ou bien les couleurs sombres des rochers qui divisent et déchirent son lit ; enfin, son cours variable et inégal, tantôt lent et tantôt impétueux, ses eaux furieuses et plus loin polies comme une glace, portent l’empreinte du désordre général ; ce n’est qu’après avoir franchi tant d’entraves, qu’il sort triomphant de la lutte, et qu’il prend enfin une marche paisible, un mouvement égal, qui ne seront plus troublés jusqu’à son embouchure. Telle est la barrière que la nature a mise entre l’Égypte et la Nubie, et tel est le tableau qu’offre au voyageur le site imposant de la dernière cataracte.

§. II. Description de la dernière cataracte et du chemin
qui y conduit.

La dernière cataracte est appelée Chellâl en arabe ; c’est aussi le nom d’une île et d’un hameau bâti en face, où habitent une centaine de Barâbras. Elle est située au tiers de l’intervalle de Philæ à Syène, mesuré sur le fleuve, c’est-à-dire, à environ trois mille mètres ou quinze cents toises au-dessous de Philæ. La largeur du fleuve en ce point est de plus de mille mètres ou d’un quart de