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CH. II, DESCRIPTION DE SYÈNE

lices du climat de l’Italie et au spectacle de la capitale du monde, quel séjour qu’une ville ruinée comme était Syène au temps de Juvénal, un lieu environné de toutes parts de rochers nus et rembrunis, un ciel embrasé, jamais tempéré par une goutte de pluie ! Martial a caractérisé en un seul vers cette aridité et cette couleur sombre du sol :

Scis quoties Phario madeat Jove fusca Syene[1].

Mais ce lieu si âpre, et presque inhabitable aux Européens, était pour les géographes un des points les plus importans du globe : il a servi à Ératosthène, à Hipparque, à Strabon et à Ptolémée, de point de départ pour déterminer la position des lieux de la terre. C’était, dans l’antiquité, la seule ville placée sous cette ligne qui sépare la zone torride de celle que nous habitons, et qui ne traversait sur le globe aucun autre site remarquable que les embouchures de l’Indus et du Gange. De nos jours même, on ne peut citer que Chandernagor et Canton en Asie, et la Havane aux Antilles, qui soient aussi près de cette ligne que Syène l’est aujourd’hui : je ne parle pas d’Yanbo ni des îles Sandwich, ou autres lieux sans importance.

Depuis deux à trois siècles, les critiques ont fait un grand nombre de recherches pour déterminer l’étendue de l’Égypte par la mesure d’Ératosthène, et réciproquement pour apprécier cette mesure de la terre par la longueur de l’Égypte ; mais, comme ils n’ont pas connu

  1. Martial, Épigramm. lib. IX, epigr. 36.