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DE L’ÎLE DE PHILÆ.

il semble avoir parlé à la postérité. Ces objets, en reportant la pensée vers les siècles reculés, ajoutent au tableau des beautés d’un ordre supérieur à tout ce que la nature seule peut présenter dans les sites les plus imposans.

Tandis que la barque sur laquelle on doit passer le fleuve se fait attendre, on parcourt le rivage pour apercevoir l’île sous plusieurs aspects ; et bientôt on y remarque un édifice isolé, percé à jour, et soutenu par des colonnes ; puis une masse considérable de bâtimens, une longue colonnade, un obélisque. Quant à ce même rivage, que l’on est impatient de quitter, il n’offre que de pauvres cabanes de Barâbras[1] et les vestiges de quelques tombeaux arabes.

En traversant le fleuve, on passe assez près d’un rocher qui, du milieu de plusieurs autres, élève son sommet à plus de seize mètres[2] au-dessus des eaux. Il est, dans sa partie supérieure, divisé en deux, et représente assez bien une espèce de fauteuil sans dossier, d’une gigantesque proportion. Les habitans de Syène qui servent de conducteurs aux étrangers, racontent, en effet, au sujet de ce siége, des histoires de géans, mais qui ne peuvent mettre sur la voie d’aucune tradition historique. D’ailleurs, la forme de ce rocher est évidemment naturelle ; on voit seulement qu’elle a été remarquée dès les temps anciens, et que l’on a taillé par derrière des marches pour s’élever jusqu’au siége. Cette roche porte aussi des sculptures faites avec soin et profondément

  1. On donne en Égypte le nom de Barâbras aux Nubiens qui habitent depuis les cataractes jusqu’à Ibrim.
  2. Cinquante pieds environ.