Page:Deschamps - Trois Satires politiques, 1831.djvu/25

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 24 —

Aussi grands citoyens, mais moins intelligens,
Ces banquiers, après tout, sont d’assez pauvres gens
Ils ne comprennent bien qu’un côté de la vie :
Donc la religion, l’art, la philosophie,
Dans leurs étroits cerveaux ne sauraient pénétrer,
Vu que ces choses-là ne se peuvent chiffrer.
Aussi souhaitent-ils qu’enfin notre patrie
Se change tout entière en fourneau d’industrie ;
Car l’homme, suivant eux, vit seulement de pain.
Mais ainsi que son corps, messieurs, son ame a faim
Et ce n’est pas à vous, gens d’épaisse nature,
Qu’elle ira demander sa sublime pâture :
C’est à ceux qui s’en vont prodiguant de leurs main
Une manne céleste aux profanes humains,
Les consolent des jours passés dans la poussière,
Et soulagent l’esprit du poids de la matière :
Les poètes divins que vous placez si bas,
Et qui, lorsque vaincus dans les prochains combats,
Vous dormirez couverts par une nuit profonde,
Ainsi qu’aux jours anciens gouverneront le monde,
Eux qui, dans la ferveur du siècle industriel,
Quand tous sont prosternés, seuls regardent le ciel,