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Car il faut de l’amour, un cœur libre et joyeux
À qui veut déployer ton manteau radieux ;
Et mon ame est de plomb ; je souffre, je soupire ;
Et tout ce que je vois me pousse à la satire,
Et je sens tous mes nerfs se tendre, et, chaque jour,
Grandir en moi la haine et décroître l’amour.

Le moyen, dites-moi, de souffrir, sans colère,
Ce qu’on jette à présent au stupide parterre,
Ce qu’on lit le matin dans d’infâmes journaux,
Ce qu’on entend le soir sur d’infâmes tréteaux ?
Ah ! laissez donc en paix descendre dans la tombe
Les prêtres et les rois, enfin tout ce qui tombe,
Même ceux que le peuple, avec sa main de fer,
Poussait au mois d’août du côté de la mer.
Laissez Napoléon dans son île lointaine
Dormir tranquille, au bruit de la vague africaine.
Si vous le réveillez, que ce soit hardiment :
Tirez-le tout entier de son froid monument,
Afin qu’on puisse voir, sur cette ombre sublime,
S’il n’est point une tache, indice de son crime.