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Dans ces instans de calme une fête est donnée
        Par le vieux chef des Capulets.
Le jeune Roméo, plaignant sa destinée,
Vient tristement errer à l’entour du palais ;
Car il aime d’amour Juliette… la fille
        Des ennemis de sa famille !…
Le bruit des instruments, les chants mélodieux
        Partent des salons où l’or brille,
Excitant et la danse et les éclats joyeux. —
Poussé par un désir que nul péril n’arrête,
Roméo, sous le masque, ose entrer dans la fête,
Parler à Juliette… et voilà que du bal
Ils savourent tous deux l’enivrement fatal.
Tybalt, l’ardent neveu de Capulet, s’apprête
À frapper Roméo que tant d’amour trahit,
Quand le vieillard, touché de la grâce et de l’âge
Du jeune Montagu, s’oppose à cet outrage
Et désarme Tybalt, qui, farouche, obéit,
        Et sort, en frémissant de rage,
        Le front plus sombre que la nuit.





La fête est terminée, et quand tout bruit expire,
        Sous les arcades on entend
Les danseurs fatigués s’éloigner en chantant ;
        Hélas ! et Roméo soupire,
Car il a dû quitter Juliette ! — Soudain,
Pour respirer encor cet air qu’elle respire,
        Il franchit les murs du jardin.
Déjà sur son balcon la blanche Juliette
Paraît… et, se croyant seule jusques au jour,
        Confie à la nuit son amour.
Roméo palpitant d’une joie inquiète
Se découvre, — et ses feux éclatent à leur tour.