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Un seul regard de femme y verse un incendie ;
Ne jouez pas ainsi. C’est une maladie,
Un sort que vous jetez avec un front serein.
C’est ainsi que l’on brise un homme, et qu’un chagrin,
Quand ses jours pâlissans commencent à décroître,
Le pousse à la folie, au crime, ou dans le cloître !…


Un exemple vaut mieux que tous les grands discours ;
Je le prends à Paris, et presque de nos jours ;
Vous entendrez partout crier à vos oreilles
Qu’on n’aime plus… propos de banquiers ou de vieilles :


Eh ! quel homme aima plus une femme ! c’était
Un amour frais, brûlant, qui souffre et qui se tait ;
Le feu long-temps caché qui grandit sous la cendre.
À force de se taire, il sut se faire entendre…
Vous dire son extase alors, un séraphin
Le pourrait ; — mais voilà ce qu’il lui dit enfin :
« Oh ! vous m’avez placé sur un trône céleste !
Oh ! j’ai pitié des rois, si votre cœur me reste !
Tout ce que j’ai perdu, tout ce que j’ai rêvé,
Vos yeux cherchent mes yeux, et tout est retrouvé !
Avais-je des chagrins ? Je ne sais pas, j’oublie ;
Avec mon avenir, je me réconcilie ;
Comme Lazarre, un Dieu me vint toucher du doigt,
Je renais !… qu’il est beau le jour que l’on vous doit !
Mais parlez, ordonnez ; voulez-vous que le monde
Aux appels de ma voix par mille échos réponde ?
J’occuperai le monde à répéter mon nom.
Ne le voulez-vous pas, mon amour ? eh ! bien non ;