Sur le bord d’un nuage elle s’arrête… et passe
Semblable au front d’un spectre égaré dans l’espace ;
Tantôt, frêle croissant, elle se penche aux yeux
Comme un vaisseau d’argent échoué dans les cieux ;
Ce soir, c’est une reine, écartant tous ses voiles,
Qui rassemble autour d’elle et tient sa cour d’étoiles ;
Hier, dans les brouillards, son disque s’est levé
Rouge, morne et sanglant, comme un grand œil crevé ;
Et demain elle aura, loin du ciel effacée,
Caché sa honte, ainsi qu’une épouse chassée. —
Telle est la vie, avec ses retours inconstans,
Depuis le péché d’Ève, et surtout dans nos temps,
Où du monde vieilli précipitant les phases,
Dieu laisse les méchans en ébranler les bases,
Et s’arracher entre eux le saint manteau des rois,
Et pour l’arbre de sang déraciner la croix…
Cependant que son souffle, amoncelant les nues,
Pousse du Gange au Rhin des pestes inconnues !
— Pourquoi les bons punis ? pourquoi le mal vainqueur ?
Mystères ! adorons, et vivons par le cœur,
Vivons par la vertu, vivons par la pensée,
Triple don négligé de la foule insensée ;
Force, amour et lumière, humaine Trinité,
Symbole temporel de la Divinité !
Vous souriez, Louise, et sans doute vous dites
Que je tiens des discours bien forts pour des petites
De sept ans ; mais toujours l’orgueil se glisse en nous,
Et c’est pour les mamans que sont les beaux joujoux.
Ah ! vivez par le cœur, tout le reste est fragile :
Ambition ! colosse avec des pieds d’argile ;
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