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l’académie.

fierté d’homme bien né répugnait à ces conspirations lentes, à ces chuchotements tenaces, à ces brigues dans les coins, à ces manœuvres savantes, où se traînent parfois les candidatures académiques, et qui consistent à employer plus de bons amis que de bons ouvrages. On connaît la fameuse tirade de Voltaire : « L’Académie est souvent négligée par ses propres membres. Cependant, à peine un des Quarante a-t-il rendu les derniers soupirs, que dix concurrents se présentent ; un évêché n’est pas plus brigué ; on court en poste à Versailles ; on fait parler toutes les femmes ; on fait agir tous les intrigants. » Le président Bouhier, du parlement de Dijon, magistrat savant et lettré, secondait les intérêts de notre auteur avec un zèle fervent. Mais le candide Marivaux avait résolu de ne compter que sur ses mérites et refusait de visiter ses juges. Non point par orgueil, comme le maréchal de Belle-Isle, qui eut l’idée de faire faire ses visites par son écuyer. Marivaux craignait d’importuner les gens. Et puis les objections étaient nombreuses, pressantes, appuyées par l’autorité de plusieurs personnages considérables. L’abbé d’Olivet, ancien jésuite, régent de collège, traducteur de profession, en voulait principalement au « diabolique style » de Marivaux. Les immortels de l’année 1736, à savoir l’abbé Bignon, numismate, l’abbé Dubos, historiographe, l’abbé Sallier, l’abbé Alary, sous-précepteur du roi, l’abbé Gédoyn (qui passe pour avoir été le dernier amant de Ninon de Lenclos), l’abbé de Rothelin, poète latin, l’abbé Mongault, traducteur, l’abbé Terrasson, tous plus ou moins précepteurs de princes et de princesses,