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MARIVAUX.

intitulé : la Vie de Marianne ou les Aventures de Mme la comtesse de ***. On peut supposer que le succès de cet ouvrage inquiéta Crébillon fils, dont la réussite de conteur grivois pouvait souffrir d’une fâcheuse comparaison avec le succès de ce roman sans gravelures. L’auteur du Sofa, piqué au jeu, résolut de taquiner l’audacieux qui osait raconter autre chose que des aventures d’alcôve. Il écrivit, à cette fin, un conte à dormir debout : l’Écumoire ou Tanzaï et Néadarné, histoire japonaise. Résumer cette « fiction » serait la plus fastidieuse des besognes. Mieux vaut y renoncer. Qu’il nous suffise de savoir que jamais la malveillance d’un pornographe vexé ne dépassa ce degré de platitude.

Marivaux crut devoir riposter en insérant, dans l’histoire de son Paysan parvenu, quelques allusions directes aux calembredaines dont Crébillon s’était fait une sorte de spécialité. C’était faire trop d’honneur à un adversaire de si mauvais aloi. Marivaux aurait dû se rappeler ce qu’il disait un jour à d’Alembert : « Les injures dites par un écrivain décrié à un homme de lettres estimable sont l’opprobre de celui qui les dit, et l’éloge de celui qui en est l’objet ».

Marivaux goûta une joie tardive avant de mourir. Il fut élu, ayant déjà dépassé la cinquantaine, au nombre des Quarante de l’Académie française. L’affaire n’alla pas sans quelques difficultés. Cette élection fut malaisée. Le dramaturge, si habile, du Dénouement imprévu ne savait pas intriguer. Sa