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SES DÉBUTS DANS LE MONDE ET AU THEÂTRE.

restant fidèle à soi-même. Il parlait comme les personnages de ses comédies, et il jugeait, comme le marquis de Vauvenargues, que l’esprit de singularité plaît quand il est naturel. Il devint auteur en essayant de mettre sur la scène la conversation naturellement raffinée des gens d’esprit.

C’est seulement en 1720 qu’il donna au Théâtre-Italien sa première comédie, intitulée l’Amour et la Vérité faite en collaboration avec un certain chevalier de Saint-Jory. Jusqu’alors, il s’était contenté de causer, de regarder et de jouir, en bonne compagnie, de la douceur de vivre. S’il écrivait, c’était uniquement pour son plaisir ou pour celui de ses amis. En ce temps, il était ce que l’on appelle, en style de gens de lettres, un « amateur ». Retenons ce titre : l’Amour et la Vérité. Ce sont les deux ennemis que Marivaux entreprit, toute sa vie, de réconcilier.

Il rima pour le Mercure galant, en septembre 1717, un Portrait de Climène, ode anacréontique. Il publia, dans le même recueil, en 1719, des « pensées » Sur la clarté du discours et sur la pensée sublime. Il disserta « sur la populace, les bourgeois et les marchands, les hommes et les femmes de qualité », et montra, dans ces premières esquisses, la finesse ingénue qui devait, plus tard, être la marque de ses écrits.

Il composa aussi des parodies. Dans le cercle où il vivait, cercle de blasés et de sceptiques, on faisait profession de haïr le romanesque. Marivaux le haïssait aussi, mais pour des raisons qui n’étaient peut-être pas celles de tous ses contemporains ni de