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MARIANNE.

Que peut faire un chanoine en pareille occurrence ? Deux femmes, dont l’une était admirablement belle, furent tuées. Quelles étaient ces femmes ? Mystère ! Sur ces entrefaites, arrivèrent cinq ou six officiers, qui battaient l’estrade à franc étrier. Ils tirèrent, de dessous un monceau de cadavres, une enfant de trois ans, qui criait. Quelle était cette enfant ? C’était Marianne, l’héroïne de cette histoire.

Longue et triste histoire, surchargée de péripéties et fertile en jolies esquisses, frottées d’un glacis un peu pâle, à la Chardin…. Marianne est recueillie d’abord par un curé de campagne, et c’est pour nous l’occasion d’entrer dans le presbytère, de nous promener aux allées du jardin propret, de nous asseoir sur un banc rustique, en compagnie du digne pasteur, et d’entendre les dames des environs, venues de leurs châteaux à girouettes, s’extasier sur la beauté mélancolique de cette enfant.

Marianne, âgée de quinze ans, part pour Paris, avec la sœur du curé. Et nous voilà transportés à l’auberge, dans le Paris pittoresque et amusant de ce temps-là. L’auteur ne se donne point la peine de décrire la grande ville, mais on l’entrevoit, avec ses officiers du guet, ses processions, ses boutiques, ses couvents et ses éternels bateaux à lessive sur la rivière.

Marianne, que la mort imprévue de la sœur du curé laisse seule au monde et sans ressources, est confiée, par un bon récollet, aux soins charitables d’un homme grave qui s’occupe tout spécialement des ingénues en détresse. Le barbon la fait entrer, en qualité de fille de boutique, chez une marchande lingère. Marianne devient grisette, au sens exact de