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JEUNES FEMMES.

ceurs tendres, comme ces rayons de soleil qu’apaise un nuage d’été. Mais, sitôt qu’elle reprend l’assurance de son empire, sa grâce conquérante se plaît à des manèges savants et s’échappe, pour ainsi dire, en menus gestes, qui sont vifs et prestes comme un déploiement d’éventail.

De toutes les femmes dont Marivaux a fait parler l’âme légère et fragile, c’est celle-ci la plus charmante. C’est à elle peut-être que songeait Théophile Gautier, lorsqu’il noua, comme une offrande de fleurs sur un autel abandonné, ce bouquet de strophes :

J’aime à vous voir en vos cadres ovales,
Portraits jaunis des belles du vieux temps,
Tenant en main des roses un peu pâles,
Comme il convient à des fleurs de cent ans.

Le vent d’hiver, en vous touchant la joue,
A fait mourir vos œillets et vos lis.
Vous n’avez plus que des mouches de boue,
Et sur les quais vous gisez tout salis.

Il est fini, le doux règne des belles.
La Parabère, avec la Pompadour
Ne trouveraient que des sujets rebelles,
Et sous leur tombe est enterré l’Amour.

Vous cependant, vieux portraits qu’on oublie.
Vous respirez vos bouquets sans parfums,
Et souriez avec mélancolie
Au souvenir de vos galants défunts.

C’est aussi pour cette aimable marquise, n’en doutez pas, qu’un poète plus moderne, M. Fernand Gregh a murmuré, en sourdine, ce délicat menuet :

La tristesse des menuets
Fait pleurer mes désirs muets
Et je pleure