« Vous épouserez donc M. Damis ? lui demande sa servante Lisette.
— Moi répouser ? Je t’assure que non ; c’est bien assez qu’il m’épouse. »
Et, rêveuse, elle prononce ces paroles pleines de sens et d’audace ingénue :
« Ma mère dit qu’on est obligé d’aimer son mari ; eh bien ! qu’on me donne Eraste, je l’aimerai tant qu’on voudra. Puisque je l’aime avant que d’y être obligée, je n’aurai garde d’y manquer quand il le faudra ; cela me sera bien commode. »
Ses entretiens avec le fiancé qu’on lui impose montrent tout de suite qu’elle ne sait point dissimuler.
« Enfin, charmante Angélique, lui dit cet homme d’âge, je puis donc sans témoins vous jurer une tendresse éternelle. Il est vrai que mon âge ne répond pas au vôtre.
— Oui, réplique-t-elle, il y a bien de la différence.
— Cependant, hasarde-t-il, on me flatte que vous acceptez ma main sans répugnance.
— Ma mère le dit.
— Et elle vous a permis de me le confirmer vous-même.
— Oui, mais on n’est pas obligé d’user des permissions qu’on a.
— Est-ce par modestie, est-ce par dégoût que vous me refusez l’aveu que je demande ?
— Non, ce n’est point par modestie.
— Que me dites-vous là ? C’est donc par dégoût ?… Vous ne me répondez rien ?
— C’est que je suis polie.