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LES PERSONNAGES DE MARIVAUX.

vreté, d’humilité, d’obéissance, de chasteté et de clôture perpétuelle, suivant la règle de saint Benoît, observance de saint Bernard, ordre de Cîteaux, filiation de Clairvaux ».

Elle répéta machinalement mot pour mot. Elle semblait a avoir un nuage sur les yeux ». Quand elle eut quitté l’autel, et que la porte de la clôture se fut refermée sur elle comme la pierre d’un sépulcre, tout le monde pleura, dn savait — mais personne ne voulait le dire — quelle douleur cachée, quelle blessure d’amour cette religieuse agonisante emportait dans sa cellule….

Voilà, si l’on peut dire, une leçon de choses.

Ainsi donc, au moment où elles entrent dans le monde, les contemporaines de Marivaux semblent familiarisées, par un instinct qui leur tient lieu d’expérience, avec l’amour et avec la mort ; elles ont déjà une philosophie décidée, une volonté vaillante, qui contraste fort avec leurs yeux jaseurs, leur mine rieuse et leur nez à l’évent.

LUCILE

Regardons la Lucile des Serments indiscrets. La jolie fille ! Que son air est noble et fin ! Quelle aisance dans sa démarche et quel feu dans ses regards ! Comme elle est gracieuse, avenante, dans l’ajustement d’étoffes chiffonnées et fleuries dont la mode a paré sa beauté ! Elle aime, ainsi que toutes les femmes de son temps, les festons et les « agré-